QUI EST MARIE?
On rencontre des chrétiens qui boudent un peu la Sainte Vierge. Ils se demandent toujours si la dévotion qu'on a pour elle n'est pas exagérée. Ils s'inquiètent de la disproportion énorme qu'ils croient apercevoir entre le peu qu'on dit d'elle dans l'Evangile et la place qu'elle tient aujourd'hui dans l'Eglise.Ils manquent par trop d'imagination.
Je ne parle pas de cette espèce d'imagination qui donne l'envol aux chimères, mais de la puissance qui fait les grands réalistes. Grâce à elle, on se représente telles qu'elles sont les choses qu'on n'a pas sous les yeux. Par exemple, on dépasse les simples impressions pour reconnaître en profondeur dans l'époque où l'on vit les données qui commandent l'avenir, et telle est la qualité maîtresse de l'homme d'Etat. Oui bien, on sait apercevoir dans l'air, dans la lumière et dans l'âme des hommes un monument qui n'est encore qu'une abstraite épure, et l'on remplit la condition sans laquelle on n'est pas un architecte. Avouons-le, quelque domaine de l'activité humaine que nous considérions, l'imagination qui n'est pas la folle du logis mais l'intuition vraie devient une qualité extrêmement rare. Quel travail d'analogie à partir de notre expérience, de recoupement, de reconstitutions, quelle docilité, quelle insistance, quels désistements de nos partir pris, il nous faut pour pénétrer dans l'intime des êtres.
Nous voici maintenant devant une femme dont le fils est Dieu. C'est stupéfiant! Sont fils est DIEU. Essayons de peser ces mots. Ou plutôt de nous laisser enlever par eux. Dans quels abimes? On parle ordinairement à la légère, mais du jour où l'on s'aperçoit de ce que l'Evangile montre avec tant de simplicité, on ne peut rester indifférent. Si l'on croit à l'Incarnation si l'on croit que Dieu fut vraiment homme, cette femme apparaît comme vraiment sa mère. Il y a entre elle et Dieu la communication et correspondance qui existe entre une mère et son fils. Ou nous croyons des fables, ou voila une femme que Dieu a suscitée, Créateur Tout-Puissant, pour la faire à sa convenance. S'il nous faut la voir maintenant selon ce rapport de mère à fils, quelles trop étonnantes réalités n'allons-nous pas découvrir en elle? Elle a un tels Fils que le rapport se retourne; il va falloir juger d'Elle d'après son Fils qui, étant son Dieu, l'a voulue telle qu'elle fut. Ô le seul fils qui jamais put choisir parfaitement sa mère! De quelles perfections le Parfait ne l'a-t-il pas ornée?
extrait de la Préface de Pie Régamey, O.P. (Les Plus Beaux Textes sur la Vierge Marie, Paris, La Colombe, 1946)
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