lundi 12 septembre 2011

7 - De la seconde purification : celle des affections au péché (Saint François de Sales)

Assomption - A. Durër
Si tous les Israélites sortirent de la terre Égypte, ils n’en sortiront pas tous, pour autant quant à l’affection.  Dans le désert, beaucoup d’entre eux regrettaient les oignons et les viandes Égypte.  Ainsi en est-il  des pénitents qui sortent du péché sans en bannir l’attrait ; ils se proposent bien de ne plus le commettre, mais c’est à contrecœur qu’ils se privent et s’abstiennent de ses nocives délectations.
 Si leur cœur y renonce et s’en éloigne, il retourne bien souvent en arrière comme le fit la femme de Loth vers Sodome. Ils s’abstiennent du péché comme certains malades s’abstiennent de melons, car le médecin les menace de mort s’ils en consomment. Pourtant ils sont navrés de devoir s’en abstenir, ils en parlent et supputent s’ils pourraient en manger.  A tout le moins, ils désirent sentir leur odeur, et estiment heureux ceux qui peuvent les consommer.
 Ainsi font les pénitents lâches et faiblards. Ils s’abstiennent pour un temps du péché mais bien à regret. Pécher sans être damnés, ils le voudraient bien.  Ils se délectent de parler du goût du péché et regardent comme heureux ceux qui le font. Celui qui veut se venger contrariera ses volontés en se confessant, mais aussitôt après il pérorera parmi ses amis à parler de sa querelle.  N’eût été la crainte de DIEU, dit-il, il eut fait ceci et cela. Que la loi divine concernant le pardon est difficile ! Quel dommage que DIEU ne permette pas la vengeance !
Ah ! On le voit bien ! Ce pauvre homme est hors du péché et pourtant il reste empêtré dans son attrait. Il est effectivement hors Égypte, mais son appétit désire les aulx et les oignons qu’il avait l’habitude d’y manger. Il fait comme cette femme qui après avoir détesté ses mauvaises amours, se plait d’être courtisée et environnée par des muscadins. Hélas ! de telles gens sont en grand péril.
Ô Philotée*, puisque vous désirez vivre la vie spirituelle, il faut non seulement renoncer au péché, mais encore émonder de votre cœur toutes les affections qui en dépendent.  Car outre le danger de rechute, ces pauvres attraits seraient pour votre esprit une source d’anémie, le rendraient tièdes pour les bonnes œuvres qui ne pourraient être faites fréquemment et avec zèle.
Ce en quoi réside la véritable essence de la dévotion.
Les âmes qui, sorties du péché, en ont encore affections et langueurs ressemblent, à mon avis, à ces filles pâles, sans couleurs, qui ne sont pas malades mais dont toutes les actions les ont.  Elles mangent sans goût, dorment sans repos, rient sans joie, et sur le chemin elles se traînent. Ces âmes font le bien avec une lassitude spirituelle telle que leurs bons exercices sont peu nombreux, sans relief et partant, inefficaces.

*Philotée signifie "qui penche pour Dieu"

Saint François de Sales (La Vie Spirituelle dans le Monde aka Introduction à la vie dévote)

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